Salut tout le monde, je me permets de m’incruster dans ce fil, qui m’a l’air bien masculin pour le moment, pour donner mon point de vue de femme féministe qui utilise assez souvent le “les hommes”.
Tout d’abord, je suis très d’accord avec ce que @Duael a dit.
[Je me permets de répondre à ce sujet via mon expérience de personne non concernée par d’autres sujets (par exemple racisme et handicap -dans une certaine mesure). Je suis des personnes militantes sur ces sujets sur twitter. Elles twittent souvent contre “les blancs” ou “les valides”. J’ai rapproché mes sentiments à ces propos de ton ressenti sur le “notallmen”]
[Un conte gourmand]
Une histoire qu’on raconte parfois dans les milieux féministes pour expliquer le #NotAllMen:
Chez toi, tu as un gros bocal de bonbons. Si tu es une femme, depuis ta naissance, on te dit d’un côté que tu es censée aimer les bonbons. On te raconte que les bonbons, ils sont bons pour toi, mais aussi, qu’il faut savoir les manger. On te dit que si tu en manges le soir, ils risquent d’être mauvais. Si tu en manges plusieurs, tu vas passer pour une goinfre.
Un jour, t’as envie de tester les fameux bonbons. T’en prends un, il est sympa, petit gout acidulé discret. Celui d’après, il est HORRIBLE. Il te fait vomir et te rend méga malade. Celui d’après te fait tellement de mal que tu sais que tu t’en rappelleras toute ta vie. Et ainsi de suite avec les suivants. Un plutôt cool, 15 dangereux ensuite. Le problème, c’est que tu peux pas savoir à l’avance quel bonbon va être bon. T’as essayé de manger que les bleus, y’en a plein des plus ou moins mauvais, ceux qui sont dans un papier doré, pareil, ceux qui ont l’air rare, pareil. Même ceux avec un emballage “vive les mangeuses de bonbons”. A force de t’enchainer des dizaines de bonbons de moyennement bon à très très très horrible (ceux qui te font te dire que tu risques pour ta vie), tu comprends bien que le ratio est pas en ta faveur.
Vous m’avez vue venir avec mes gros sabot: on ne sait jamais sur quel mec on va tomber. Et comme les chiffres parlent d’eux même:
94 %: C’est le pourcentage des femmes qui ont déjà été victimes de violences sexistes dans les transports, d’après Osez le féminisme . 92 % des femmes en ont par ailleurs été témoins. Conséquence : les femmes évaluent leur sentiment de sécurité à 5,9 sur 10…et 3 femmes sur 4 adaptent leur tenue ou comportement en fonction du métro. Par ailleurs, 85 % des Parisiennes sont persuadées que leur éventuelle agression se ferait dans l’indifférence générale, contre 65 % des femmes en moyenne.
80% des femmes salariées sont régulièrement confrontées à des attitudes ou comportements sexistes (contre 56% des hommes). Par ailleurs, 1 femme sur 5 a été victime d’harcèlement sexuel au cours de sa vie professionnelle. 5% seulement des cas ont été portés devant la justice.
1 tous les 3 jours: C’est le nombre de femmes qui meurt en France sous les coups de son conjoint. Près de 216 000 femmes, âgées de 18 à 75 ans, sont victimes de violence physique, psychologique et/ou sexuelle par leur ancien et/ou actuel conjoint et seulement 27% de ces victimes se rendent chez le médecin après un épisode de violences.
Maintenant voici quelques pistes, que j’essaie de me remémorer quand je me sens victime alors que c’est clairement pas moi le centre de l’oppression:
1/ S’oublier
Oublier son égo et le tout ce qui fait de nous un individu à part entière.
En recentrant le discours de fond concernant les privilèges, les oppressions et toutes ces joyeusetés sur le “oui mais pas moi”, cela fait perdre de vue le discours des victimes. Encore et encore et encore, la parole est confisquée aux oppriméEs pour que le privilégié se sente ok avec son ego.
2/ “Oui mais”
Ici, je parlerai plus d’un biais cognitif (dont je ne connais pas le nom). On a toujours tendance à se laisser plus de liberté et à s’excuser plus de chose qu’au reste du monde. On a beau faire des choses qui nous déplaisent ou qui peuvent être carrément craignos, on a toujours une bonne raison pour (alors que les autres, c’est juste qu’ils ont failli …). J’ai du mal à donner des exemples concrets ici, mais je vais utiliser le seul qui me vient en tête: je parlais à un ami du fait que, la nuit, si t’es un mec et que tu marches derrière une fille seule, le plus sympa pour elle est de changer de trottoir (toi ça t’enlèves rien et elle est rassurée). Lui essayait de m’expliquer qu’il voit pas l’intérêt parce que lui est sympa, qu’il serait là pour intervenir si elle se fait embêter etc… Sauf que.
Sauf que une fille (oui, je généralise), va pas être sereine si elle se fait suivre la nuit par un mec (oui, je généralise). Au final, que ça soit toi, un connard, un prédateur, un mec féministe ou autre, c’est pareil. La peur est là. C’est ce que tu représentes via ton apparence, ton vécu, tes privilèges, qui font que tu es un #AllMen.
3/ Le sens des priorités
C’est chouette que tu relaies ces messages sur twitter. Essaies peut etre de mettre en regard la violence que tu ressens quand tu te sens faire partie du groupe des oppresseurs et ce qu’on peut ressentir, en faisant partie du groupe d’en face. La différence, c’est l’argent, la peur, les féminicides, les viols, la misogynie intériorisée des autres femmes… De mon point de vue, c’est incomparable.
En gros: Si tu te sens ciblé, c’est peut être qu’il reste des sujets sur lesquels tu ne te sens pas safe.
Cependant, si c’est trop violent pour toi de faire partie de cette catégorie que tu rejettes, prends du recul pendant un temps et préserve toi de ces discours, et reviens nous plus fort et prêt à endurer tout ça .
PS1: Désolée pour le potentiel manque de bienveillance de mon message, je n’ai pas l’énergie ces temps-ci pour faire des discours aussi construits que je le voudrais… #ValideMaisPasToutAFait
Je suis prête à l’éditer si besoin.
PS2: Pour des sentiments proches, concernant le “notallwhite”, suivez le compte de Napilicaio sur twitter. C’est une femme noire qui coache des personnes racisées pour arriver à survivre dans le monde de l’entreprise. Tous les jeudi, elle raconte l’histoire d’une coachée. Par exemple cette histoire-là.